Lire Tocqueville

Lire Tocqueville - Présentation du Cours

NOUS PROPOSERONS DANS CE COURS UNE LECTURE SUIVIE DE L’OUVRAGE D’ALEXIS DE TOCQUEVILLE (1805-1859), DE LA DÉMOCRATIE EN AMÉRIQUE (1835 ET 1840), QUI SERVIRA DE SUPPORT À UNE RÉFLEXION COLLECTIVE SUR LA DÉMOCRATIE AUJOURD’HUI. IL NE S’AGIRA DONC PAS TANT DE RENDRE COMPTE DE L’ŒUVRE DANS SON ENSEMBLE NI DE SA PLACE DANS L’HISTOIRE DES IDÉES, MÊME SI CES POINTS SERONT ABORDÉS INCIDEMMENT, QUE DE NOUS ATTACHER À UNE LECTURE PRÉCISE D’UN « CLASSIQUE » DE LA SCIENCE POLITIQUE POUR EN ÉPROUVER L’INTACTE FÉCONDITÉ INTELLECTUELLE. 

Ce cours a été donné  à l'Université Conventionnelle, entre novembre 2008 et mars 2009. Il comporte 7 séances et de nombreux documents accessibles sur cette page.

Le travail s'appuiera sur l'édition courante, GF - Flammarion, de 1981, en 2 volumes, introduction par François Furet. Une version du texte libre de droits est également disponible en ligne et pourra être consultée aisément ici.

 

POURQUOI LIRE TOCQUEVILLE AUJOURD'HUI?

Les références à Tocqueville et à cet ouvrage sont très nombreuses dans le champ universitaire et politique, mais il est rare de trouver des commentaires méthodiques du texte et de ses enjeux. Souvent même les citations qu’on en fait se retrouvent coupées de leur contexte et peuvent prêter à contresens. 

Or, comme le dit Tocqueville lui-même dans son introduction : « Ceux qui voudront y regarder de près trouveront, je pense, dans l’ouvrage entier, une pensée mère qui enchaîne, pour ainsi dire, toutes ses parties. » (p.71) Nous proposerons donc une lecture complète de l’ouvrage afin de tenter de bien comprendre la pensée de Tocqueville et ses implications. Nous tenterons de montrer notamment dans quelle mesure les réflexions de Tocqueville sur la démocratie nous permettent de comprendre nos sociétés actuelles. 

 

Construction de l'ouvrage

Le premier tome de De la démocratie en Amérique nous propose une description critique des institutions américaines au sens large, institutions qui comprennent aussi bien les pouvoirs constitutionnels qui fondent son « gouvernement » que les institutions qui font le relais entre ce pouvoir politique et la société civile (comme les partis politiques, la presse, les associations de tous types…qui constituent le domaine de ce que Tocqueville appelle « les mœurs politiques »). Le deuxième tome, que nous étudierons par la suite, s’intéresse quant à lui aux effets de ces institutions sur la société civile elle-même et notamment sur les idées, les sentiments et les « mœurs » privées des citoyens. (Introduction, p.69). 


On voit donc le mouvement général de l’ouvrage qui a pour but de présenter une étude systématique et ordonnée du double principe qui fonde les sociétés démocratiques : l’égalité de conditions et la souveraineté populaire qui en découle. De l’aveu même de Tocqueville, il s’agit ici de s’interroger sur « la marche que [la démocratie] imprim[e] au gouvernement [...] » ainsi que sur « les biens et les maux produits par elle » (Introduction, p.69). 

L’enchaînement des chapitres obéit à une logique rigoureuse qui doit permettre, pour Tocqueville, de présenter de la manière la plus « neutre » possible la marche et les effets de la démocratie dans un pays jeune et (quasiment) vide avant l’arrivée des premiers colons (nous reviendrons dans le cours sur l’analyse que fait Tocqueville des sociétés indiennes antérieures à ce « moment fondateur » que constitue pour lui le débarquement des premiers « pèlerins » puritains en Nouvelle-Angleterre). 

 

La démocratie, phénomène "révolutionnaire"

Précisons tout de suite que « neutre » ne veut pas dire ici que Tocqueville se contente de décrire techniquement et dans une seule visée « documentaire » les institutions et la société américaine : cette description très informée sert au contraire de fondement à une réflexion poussée sur les avantages et les inconvénients (« les maux et les biens » évoqués plus hauts) d’un gouvernement démocratique, ainsi que sur les causes de ceux-ci. Malgré ce qu’il dit lui-même de sa volonté de ne pas porter de jugement de valeur sur la « révolution sociale » (« je n’ai même pas prétendu juger si la révolution sociale [...] était avantageuse ou funeste à l’humanité », Introduction, p.69), il est très explicite sur la nécessité qu’il ressent de « trouver des enseignements dont nous puissions profiter » (p.68) pour améliorer la mise en œuvre de la démocratie dans nos propres sociétés. 

    Car Tocqueville part en effet d’un constat très clair : la démocratie, caractérisée par l’égalité de condition, est un processus universel, continu, inéluctable et irréversible (« Le développement graduel de l’égalité de conditions est donc un fait providentiel, il en a les principaux caractères : il est universel, il est durable, il échappe chaque jour à la puissance humaine ; tous les évènements comme tous les hommes, servent à son développement », Introduction, p.60). En conséquence, il ne sert à rien de tenter d’entraver la marche de la « Révolution démocratique » que connaissent tous les pays européens, et notamment la France. Il faut plutôt tenter de la comprendre pour en mesurer les effets et, malgré tout, essayer d’en tirer le meilleur, en évitant le pire, afin « d’apercevoir, s’il se peut, les moyens de la rendre profitable aux hommes» (Introduction, p.69). 

    Dans ce but, il se tourne vers les Etats-Unis d’Amérique, car cet Etat lui semble fournir le meilleur exemple d’un régime politique fondé sur les principes démocratiques. Son histoire est à la fois assez jeune pour que les effets directs et spécifiques de la démocratie puissent y être décelés sans « interférence » avec d’autres éléments historiques, et assez ancienne déjà pour fournir quelque recul à l’analyse. Mais la considération des institutions et de la société américaine est à tout moment pensée comme un moyen de mieux comprendre les sociétés européennes, dont l’histoire beaucoup plus ancienne est trop troublée pour permettre une analyse précise. 

     

    INSTRUIRE LA DÉMOCRATIE

    L’ouvrage d’Alexis de Tocqueville propose donc une réflexion politique théorique informée par l’exemple empirique que sont les Etats-Unis de son époque. A partir de cette analyse, il entend avant tout « instruire la démocratie »(Introduction, p.61), c’est-à-dire à la fois ceux qui gouvernent les sociétés démocratiques, mais aussi ceux qui vivent sous ce gouvernement : 

    « Instruire la démocratie, ranimer s’il se peut ses croyances, purifier ses mœurs, régler ses mouvements, substituer peu à peu la science des affaires à son inexpérience, la connaissance de ses vrais intérêts à ses aveugles instincts ; adapter son gouvernement aux temps et aux lieux ; le modifier suivant les circonstances et les hommes : tel est le premier devoir imposé de nos jours à ceux qui dirigent la société. Il faut une science politique nouvelle à un monde tout nouveau » (Introduction, p.61-62). 


    Dans une société démocratique, les principes d’égalité de conditions et de souveraineté populaire font de chacun de nous ces dirigeants de la société qu’évoque Tocqueville et auxquels il tente d’apporter quelque lumière sur la marche de notre monde. Il est donc toujours temps de continuer à nous instruire avec lui.

    Accéder aux séances

    Accéder aux ressources du cours, et particulièrement à une notice sur ses enjeux.

    NOTE

    Ce cours a été donné par Francisco Roa bastos à l'Université Conventionnelle, entre novembre 2008 et mars 2009. Il comporte 7 séances et de nombreux documents accessibles dans l'onglet ressources.

    Les séances

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    On trouvera ici les intitulés et les enregistrements des 7 séances que Francisco Roa Bastos a consacré à la lecture de Tocqueville entre 2008 et 2009  durant la première saison de l'Université Conventionnelle. On se reportera également aux divers compléments du cours (textes d'approfondissements, notice biographique ou cartes) qui éclairent et supportent le travail des séances. Une liste de lecture rassemblant l'ensemble des enregistrements est consultable ici.

     

    Séance du 5 novembre 2008

    La première séance du cours sur De la démocratie de Tocqueville sera principalement une séance d’introduction à l’œuvre. Après quelques considérations sur la vie de l’auteur et le contexte historique dans lequel il écrivit son ouvrage, nous présenterons le mouvement général du livre et nous commencerons à le commenter, en nous arrêtant particulièrement sur un premier texte tiré de l’introduction (p.61-62 de l’édition GF).

     
    L’essentiel sera de montrer, lors de cette séance d’introduction, que le lecteur contemporain de Tocqueville doit avant tout s’attacher à revenir au texte lui-même, en passant au-dessus des « étiquettes » et des lectures diverses (et souvent prestigieuses) qui ont déjà été faites de son œuvre et de sa pensée. Cet auteur devenu « classique » gagne à être lu dans le texte, en détail, et sans grille de lecture préétablie. Il invite à penser avec lui. C'est ce que nous tenterons de faire tout au long de l’année. 

    Nous proposons aux personnes intéressées par le cours de lire déjà au moins le début de l’introduction, jusqu’au texte qui sera commenté, ce qui permettra de commencer à travailler précisément dès le premier cours.

     

    Séance du 19 novembre 2008

    La deuxième séance du cours sur De la démocratie de Tocqueville sera consacrée à l’analyse détaillée du premier texte proposé. 

    Après la séance d’introduction qui nous a permis de nous familiariser avec le contexte historique de l’écriture de l’ouvrage De la démocratie en Amérique, nous commencerons lors de cette séance notre lecture suivie, en nous arrêtant tout d’abord sur ce premier texte tiré de l’introduction de l’œuvre. Il nous permettra de dégager les principaux thèmes de l’ouvrage. Nous commencerons, si le temps le permet, l’étude d’un deuxième texte, lui aussi tiré de l’introduction, qui nous permettra d’approfondir ces thématiques avant de nous lancer dans la lecture des chapitres plus précis du début de la première partie, lors des prochaines séances.

     

    Séance du 17 décembre 2008

    La troisième séance du cours sur De la démocratie de Tocqueville sera consacrée à faire le point sur une question importante qui traverse tout l’ouvrage : les rapports entre religion et vie publique. Nous tenterons de comprendre ce qu’en dit Tocqueville dans son ouvrage et les implications que cela peut avoir. 

    Par ailleurs, nous commencerons le commentaire du second texte tiré de l’introduction.

     

    Séance du 14 janvier 2009

    La 4e séance du cours sur De la démocratie en Amérique sera consacrée au commentaire du Chapitre Ier de la Première Partie, intitulé « Configuration extérieure de l’Amérique du Nord », qui marque le début de l’étude en tant que telle de l’Amérique que propose Alexis de Tocqueville dans son ouvrage. Nous nous arrêterons plus précisément sur les considérations que Tocqueville consacre aux « tribus indigènes » que découvrirent les premiers colons anglais en débarquant en Amérique et sur les implications sociales et politiques de ces considérations pour la suite de l’ouvrage. Nous continuerons ainsi notre lecture suivie de l’ouvrage, qui peut être prise en cours de route par n’importe quel auditeur intéressé n’ayant pas pu assister aux séances précédentes. 

    Vous pouvez consulter en ligne les deux extraits plus précis sur lesquels s’appuiera le commentaire du chapitre (voir textes 3 et texte 4). 

    Nous renvoyons également aux différentes cartes qui faciliteront la compréhesion du texte et du cours.

     

    Séance du 28 janvier 2009

    La 5e séance du cours sur De la démocratie en Amérique sera consacrée au commentaire du Chapitre II de la Première partie, intitulé « Du point de départ et de son importance pour l’avenir des Anglo-américains ». 

    Ce chapitre nous permettra de revenir sur l’histoire de l’arrivée des premiers colons anglais en Amérique du Nord. Nous nous arrêterons plus précisément sur deux textes tirés du chapitre II, dont le commentaire devrait nous permettre de comprendre comment Tocqueville lie la question du « point de départ » historique d’un peuple à son évolution ultérieure, et comment il applique cette idée à son analyse des Etats-Unis.

     

    Séance du 11 février 2009

    La 6e séance du cours sur l’ouvrage de Tocqueville, De la démocratie en Amérique, portera sur le chapitre III de la première partie du tome 1 intitulé « Etat social des anglo-américains ». Ce chapitre, et notamment les commentaires de ce premier et de ce second extrait,  nous permettront de mieux comprendre ce que Tocqueville entend par démocratie, à savoir l’égalité des conditions matérielles, et ses liens avec la liberté politique.

     

    Séance du 11 mars 2009

    La 7e séance du cours sur l’ouvrage de Tocqueville, De la démocratie en Amérique, (mercredi 11 mars, 19h30-21h00) portera sur le chapitre IV de la première partie du tome 1 intitulé « Du Principe de la souveraineté du peuple en Amérique »

    Ce chapitre très court occupe une place centrale dans la structuration de la première partie du Tome 1 : il nous permet en effet de faire le lien entre l’analyse de l’état social des anglo-américains que Tocqueville vient de faire dans les chapitres précédents et l’analyse très précise des institutions et des lois politiques des Etats-Unis qu’il est sur le point de commencer. 

    C'est donc un « chapitre-pivot » qui traite du principe de la souveraineté du peuple, principe fondamental que Tocqueville précise ici dans sa nature et ses enjeux. En raison de l’importance et de la brièveté du chapitre, nous le commenterons dans son ensemble.